Une loi sur la responsabilité sociale, dites-vous? Cela peut paraître étrange, voire antinomique, mais c’est bien ce qui s’est passé en Inde. Tout cela soulève bien des questions, mais regardons tout d’abord de plus près ce qu’il en est.
Le principal point est que cette loi requiert de toute entreprise – tout du moins celles ayant une certaine stabilité financière – de dépenser au moins 2% de leur profit annuel dans des initiatives de type RSE. La portée de ces initiatives reste assez floue, toutefois cela doit toucher à des domaines tels que l’éradication de la faim et de l’extrême pauvreté, la promotion de l’éducation, assurer la durabilité environnementale, etc.
La loi implique aussi la création d’un comité RSE au sein de l’entreprise, ainsi que de nombreuses recommandations sur le recours à des auditeurs. De même, et c’est intéressant, il est prévu des sanctions à l’égard des entreprises qui ne respecteraient pas ces obligations. Je n’ai pas eu les détails sur les conséquences exactes d’une infraction à cette loi, mais, comme pour toute loi, il est prévu de prendre des mesures à l’égard de ceux qui ne la respecteraient pas. Quelques informations supplémentaires ici.
Je l’avais déjà évoqué dans un article précédent, je ne suis pas entièrement convaincu par cette idée de rendre la RSE obligatoire. Pourra-t-on encore parler de responsabilité sociale? Je me mets souvent l’accent sur la nécessité d’aller au-delà de la « compliance », au-delà des exigences des lois, pour toute entreprise désireuse de devenir « responsable ».
D’un autre côté, la relativement grande liberté laissée dans le choix des projets dans lesquels investir laisse une certaine marge de manœuvre, voire presque un côté volontaire à la démarche. Chaque entreprise pourra décider comment dépenser cet argent, et cela aura un vrai impact sur l’aspect véritablement responsable ou non des initiatives.
Enfin, je dirais qu’à force d’utiliser des carottes pour promouvoir la RSE – retour sur investissement, amélioration de l’image, attraction de talents, etc. – il serait tout aussi bon de pouvoir avoir recours au bâton. C’est ce qu’une loi, avec ses sanctions, va permettre de faire.
Merci pour le poste Julien. On se retrouve bien sur l’analyse, « beyond the law » est le coeur même de la RSE donc ou se trouve la ligne quand on voit qu’il y à un flou énorme pour savoir ce qui est de la RSE.. Donc, QUID du référentiel utiliser pour définir ce qui en fait partie ou pas?
L’initiative est clairement dans la tendance d’inscrire les objectifs sociaux, environnementaux et communautaires dans les réglementations, donc intéressants, maintenant il faut savoir que cette loi en Inde s’applique à 800’000 entreprises environ , donc l’organe de contrôle va faire comment pour en assurer la bonne application ? Ou simplement valoriser ce qu’elles font…
Voici une courte analyse de KPA sur le sujet : http://www.kordant.com/assets/2-Percent-India-CSR-Report.pdf
Mon avis sur la carotte et le bâton :
la stimulation c’est bien, le contrôle c’est mieux 🙂
Bonne semaine
Jonathan
Julien, à la question « chronique » d’une RSE volontaire ou obligatoire, la réponse est de trouver la 3ème voie. Si les organisations se contentent de ne « Faire » que de la RSE et ne pas s’en « Occuper », la pression réglementaire et législative ne fera que s’accentuer, développant le concept d' »Obligation Volontaire » chère par exemple à la France.
Rappelons que Howard R.Bowen, 20 ans après son ouvrage de référence « Social Responsabilities of the Businessman – 1953 » jugeait idéaliste l’idée d’une responsabilité sociale totalement volontaire et avançait l’idée qu’une démarche plus contraignante était nécessaire.
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Merci Messieurs pour vos avis qui apportent un réel plus à cet article! Ce que je trouve intéressant dans cette loi, c’est le côté « obligation de dépenser 2% du profit mais liberté de le faire de la façon que l’on juge la plus appropriée ». Je pense que l’on est ainsi entre l’obligatoire et le volontaire. Peut-être cette 3e voie qu’évoque Marc.
Bien sûr, en donnant cette liberté, le législateur donne la possibilité à des abus; des entreprises qui pourraient peut-être dépenser cet argent dans des projets peu concluants. Et comme le suggère Jonathan, tout cela va être difficile à surveiller!
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