Livres – Leaders – Horizons

Je lis beaucoup, c’est vrai. Je vise toujours de lire 12 livres par an, termine l’année environ à 16, et en ai lu 30 en 2020 pour des raisons aussi évidentes que malheureuses. J’essaie toujours de lire 3 livres en parallèle: un roman, un livre « business » et un livre pour ouvrir mes horizons. Je crois que c’est ce qui fait un bon leader responsable: apprendre, constamment, tout en sachant s’évader et sortir des sentiers battus.

On me demande régulièrement des recommandations de lectures et j’ai donc réfléchi à une liste de 13 livres que tout leader devrait avoir lu au moins une fois dans sa vie. Certains de ces livres sont des classiques, d’autres des trésors cachés. Je crois que cela peut faire un excellent programme de lecture sur une année!

  1. Give & Take, par Adam Grant. Le premier d’une série de trois livres que je considère comme une trilogie, indissociables les uns des autres, alors que ce sont trois auteurs différents qui les ont écrits. Et que tout leader se devrait d’avoir lu, pour mieux se comprendre et comprendre les autres. Adam Grant nous démontre comment les personnes qui « donnent » peuvent avoir du succès, moyennant quelques ajustements. On peut être du côté des gentils, voir le monde comme un jeu à somme non-nulle, et réussir aussi bien sa vie que sa carrière. Existe aussi en version française.
  2. Quiet, par Susan Cain. Le 2e ouvrage de la trilogie! Un classique qui s’adresse aux introvertis, et aussi à ceux qui interagissent avec eux. Je fais partie des deux catégories! Lire ce livre m’a aidé à me comprendre et m’accepter, puis à appliquer cette compréhension à d’autres, me permettant d’amener celles et ceux qui sont plus en retrait à performer et à partager leurs idées, souvent tout aussi valables que celles de ceux qui ont une grande bouche! La version française ici.
  3. How to Be a Power Connector, par Judy Robinett. 3e et dernier membre de la trilogie. Il s’agit pour moi du livre sur le networking que tout un chacun devrait avoir eu dans les mains au moins une fois. Je recommande tout particulièrement le chapitre s’adressant aux femmes – et qui est bien sûr très utile aux hommes également. Robinett m’a fait saisir l’importance du networking, et à quel point il est central de le pratiquer avec authenticité tout en étant très stratégique.
  4. The Years of Rice and Salt, par Kim Stanley Robinson. Sans aucun doute, mon livre de fiction préféré! J’adore tout ouvrage dont le postulat de départ est « Et si… ». Et si la peste du XIVe siècle avait décimé non pas 30 mais 99% de la population européenne? « Et si…? » est pour moi une question centrale, qui permet de trouver réponses à de nombreux problèmes. La version française.
  5. Dune, par Frank Herbert. Un classique, et le seul autre ouvrage de fiction de cette liste. Je suis convaincu que de lire de la (science-)fiction est bénéfique pour le cadre professionnel. Développer l’imagination, penser en scénarios, envisager des opportunités…autant de qualités qui peuvent être développées.
  6. Hostage at the Table, par George Kohlrieser. Un incontournable de la littérature sur le leadership. George Kohlrieser puise dans son expérience de négociation d’otages pour tirer des leçons applicable aussi bien à la vie de tous les jours que dans le cadre du travail. Ce que j’en retiens est que l’on peut être otage d’autres personnes, bien sûr, mais aussi de situations, de pensées, de soi-même. Le livre offre de précieux outils et conseils pour que cela ne nous arrive pas.
  7. The Order of Time, par Carlo Rovelli. Comprendre le temps permet de ne pas se laisser dominer par lui – pour autant qu’il existe! Un livre mêlant philosophie et physique quantique. J’aime résumer la pensée de Carlo Rovelli avec cette citation:  »
    The fundamental theory of the world must be constructed in this way; it does not need a time variable: it needs to tell us only how the things that we see in the world vary with respect to each other. That is to say, what the relations may be between these variables. » Existe aussi en français!
  8. The Signal and the Noise: The Art and Science of Prediction, par Nate Silver. Nate Silver, auteur de FiveThirtyEight, clarifie et rationalise la science de la prédiction, souvent galvaudée. On y apprend que ce n’est pas facile, bien sûr, mais que c’est possible. Vous vous êtes déjà retrouvé dans une situation vous donnant l’impression de chercher une aiguille dans une botte…d’aiguilles? Ce livre peut vous aider à y voir plus clair.
  9. The Culture Code, par Daniel Coyle. Un auteur fameux a dit que la culture mangeait la stratégie pour le petit-déjeuner. Je préfère dire que les deux devraient prendre le petit-déjeuner ensemble, mais le fait est que la culture organisationnelle est quelque chose d’extrêmement important. Daniel Coyle la rend tangible, actionnable, fournissant aux leaders un fantastique levier pour agir durablement sur leur organisation.
  10. Shambhala: la voie sacrée du guerrier, par Chögyam Trungpa. Un livre que j’aurais aimé avoir entre les mains alors que j’étais adolescent. Un livre qui nous montre que nous pouvons trouver une vie pleine de sens, qui nous serve à nous et aux autres.
  11. The First 90 Days, par Michael Watkins. Un programme pour vos 90 premiers jours dans un nouveau rôle de leadership. D’une valeur inestimable lorsque l’on transitionne d’une position à une autre. Le livre nous rappelle la complexité et la multiplicité des chantiers à lancer, mais aussi à quel point nous sommes capables de le faire, avec les bons outils. En français ici!
  12. The Trusted Advisor, par David Maister. Nous sommes tous des consultants, des conseillers. Même si ce n’est pas notre job, notre titre, nous sommes sans cesse sollicité pour donner notre avis, pour conseiller un collaborateur, un ami. Et ce n’est pas si facile que cela! David Maister nous guide dans l’art de donner conseil, et surtout de créer en amont la confiance nécessaire pour que nos conseils aient un véritable impact.
  13. A Sand County Almanac, par Aldo Leopold. Avant de lire des livres sur la responsabilité sociale, sur la durabilité, je crois qu’il faut savoir repenser à ce que la nature représente pour nous. Dans ce classique, Aldo Léopold nous (re)connecte avec notre environnement, nous rappelons que nous en faisons partie. Nous sommes la nature, pas une entité séparée d’elle. L’Almanach en français.

Lesquels avez-vous déjà lus et que vous ont-ils apporté? En recommanderiez-vous d’autres?

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Privilège – Fatigue – Leadership

Nous arrivons à la fin de l’année, le moment des habituels bilans, de la prise de distance par rapport à ce que l’on a vécu au cours des 12 derniers mois. Je ne déroge pas à la règle, même si je vais plutôt me concentrer sur les 6 dernières semaines. Mon souvenir de cette période qui a commencé aux alentours du 15-20 novembre n’est pas agréable, loin s’en faut. J’ai terminé l’année sur les genoux, professionnellement parlant.

J’en ai eu marre. Je n’en pouvais plus. Je faisais des erreurs, j’oubliais des choses, et je n’avais plus d’énergie en fin de journée. J’ai compté les jours, les heures avant la « libération » à la fin de la journée du 23 décembre. Et ultime effort, travaillant à la maison, il m’est revenu de décider à quel moment je m’arrêtais. Ca s’est fait progressivement: d’abord quitter la table de travail, regarder mon ordinateurs 1, 2, 3 fois puis se décider à l’éteindre, arrêter d’y penser. Ca a été un soulagement, bien plus que d’habitude. Une forme de STOP à une situation qui était difficilement supportable, alors qu’en temps normal, être en vacances représente pour moi rien de plus qu’une légère évolution sur un continuum.

Je dois l’admettre, cette année 2020 a été épuisante, exigeante. Elle m’a pris une énergie folle. Et surtout, tout au long de l’année, j’ai été pris en tenaille entre cette fatigue émotionnelle et physique que j’ai ressentie, et la conviction que je n’étais pas en position de me plaindre.

Que faire alors, en tant que leader responsable? Je n’ai pas de solution toute faite, bien sûr, mais quelques observations.

Pour soi, je ne peux que conseiller de tout d’abord accepter cette situation. J’ai vu beaucoup de gens autour de moi – et je dois m’inclure moi-même dans cette catégorie – parler avant tout de la situation privilégiée dans laquelle nous sommes: nous avons gardé nos jobs avec peu ou pas de réduction de taux d’activité ou de salaire; nous avons pu continuer à sortir, nous promener; nous habitons des appartements ou maisons dans lesquelles l’on ne se sent pas les uns sur les autres et où il est facile de travailler, etc. Nous sommes privilégiés, certes, mais cela ne doit pas nous empêcher de reconnaître que nous avons vécu une année difficile et qu’elle a eu un impact sur nous. Reconnaissons-le, cela nous aide à accepter les moments de moins bien, les moments où l’on commet des erreurs, les moments où l’on est moins productifs.

Comment cela se traduit dans notre relation aux autres? Comment agir, en tant que leader responsable? Je crois que simplement en abordant avec honnêteté et transparence cette situation, on avance déjà beaucoup. On aide, même, nos collègues à accepter la situation. A chaque fois que j’ai fait le premier pas de dire que la situation n’était malgré tout pas si facile que ça pour moi, j’ai vu mes collègues s’ouvrir, ressentir une sorte de soulagement, et partager avec moi, à leur tour, leurs difficultés. Avoir montré ma vulnérabilité leur a permis d’accepter la leur, et de reconnaître avec plus de clarté la situation dans laquelle ils se trouvent. Et cette reconnaissance, cette acceptation est souvent la voie pour trouver des solutions.

Aider les autres m’a aussi redonné de l’énergie. On a beaucoup entendu « prenez soin de vous », au cours de cette année 2020. Pour ma part, j’ai appris que je ne me sentais jamais aussi bien que lorsque je prenais soin des autres. Et que même en étant privilégié, on peut se sentir en difficulté.

Bonne année à toutes et à tous. Soyez indulgent, prenez soin de vous, et des autres.